Le président américain Barack Obama a appelé à un sommet afro-américain le 6 et 7 Août prochain à Washington. Ce sommet a des dimensions stratégiques en raison de l’importance des ressources naturelles du continent noir pour l’avenir. Le Maroc participera à ce sommet, mais quel sera son rôle, sera-t-il un interlocuteur clé parmi les pays africains, et quel sera l’impact de sa participation sur le dossier du Sahara ?
Le président Obama assistera à ce sommet en compagnie de 47 dirigeants africains, à l’exception de ceux qui connaissent des situations politiques instables comme l’Égypte et la République Centrafricaine.
L’intérêt de Washington pour le continent noir est illustré par les rapports des Think Tank américains qui indiquent que c’est le continent de l’avenir grâce à ses ressources naturelles surtout des minéraux indispensables pour le futur de l’industrie mondiale. Le sommet se tiendra sur fond de concurrence féroce de pays tels que la Russie, l’Iran, le Brésil, et surtout la Chine, chacun essayant d’orienter les relations avec l’Afrique à son avantage.
La presse de l’Afrique noire s’intéresse à ce sommet, comme en témoignent les articles parus dans plusieurs pays tels que le Sénégal, le Ghana, la Côte-d’Ivoire, le Libéria et le Kenya. Quant à la presse marocaine, elle ne l’a traité qu’à partir d’un seul angle, extrêmement étroit, à savoir le retour du roi Mohammed VI à la Maison Blanche après sa visite en Novembre de l’année dernière.
D´une perspective marocaine, la question qui se pose est la suivante : est-ce que ce sommet va apporter un bénéfice diplomatique et stratégique pour le Maroc ? Il est peu probable que le Maroc récolte des résultats positifs, il pourrait même s’en sortir avec un impact négatif sur ses intérêts dans le dossier du Sahara occidental.
À cet égard, le principal interlocuteur de Washington en Afrique est l’Union Africaine, que le Maroc a quitté en raison de l’adhésion du Polisario en tant qu’État en 1981. En revanche, le Maroc est classé par la diplomatie des États-Unis dans la zone Afrique du Nord et Moyen-Orient, ou le monde arabe. L’agenda américain en Afrique est différent de son agenda pour le monde arabe.
Les pays de l’Union africaine participeront au sommet avec des États-Unis avec un agenda comprenant les thèmes qu’ils considèrent majeurs, comme le développement, la participation dans les décisions mondiales et la stabilité politique. Le conflit du Sahara est l’un des cinq dossiers importants de l’Union africaine. Or, l’Union africaine est dominée par les pays anglophones ainsi que le Nigeria et l’Algérie. Tous ces pays partagent la même vision du conflit du Sahara, aux antipodes de celle du Maroc. Des diplomates américains ont déjà attiré l’attention de Rabat qu’à un moment où le monde entier redéfinit ses cartes géopolitiques et où de nouvelles alliances se tissent, il était illusoire d’espérer que les USA puissent sacrifier la relation avec l’Union africaine pour faire plaisir à un seul pays, le Maroc, en raison du conflit du Sahara.
Sur un autre registre, la France se considère le plus grand perdant du sommet. Elle va donc s’employer à maintenir ses intérêts sur le continent, ce qui pourrait la conduire à une concurrence ouverte avec Washington, en particulier depuis que l’Afrique est devenue le dernier bastion qui permet à Paris de maintenir sa présence internationale. Ainsi, le Maroc risque de se trouver contraint de s’allier avec l’un de ces deux protagonistes et prendre de la distance vis-à-vis de l’autre. Compte tenu de l’importance de la France pour le Maroc, il est probable que Rabat conserve sa proximité avec Paris et appréhende ce sommet afro-américain sans trop d’espoirs ni d’enjeux.