Le gouvernement marocain, sous la présidence d’Abdelilah Benkirane, vient d’adopter un projet de loi qui organise les banques islamiques et permet la création d’instruments financiers nouveaux ( Mourabaha, Ijara, Moucharaka, Moudaraba). Cette décision survient après des mois de retard et des années d’attente au sein de la société marocaine. Elle intervient aussi alors que des pays occidentaux ont déjà pris des mesures dans ce sens visant à attirer des capitaux qui rechignent à atterrir dans les banques classiques. C’est la première mesure à caractère islamique prise par un gouvernement présidé par un leader politique à l’orientation islamiste.
Le gouvernement va renvoyer son projet de loi au Parlement pour l’examiner avant de le voter. Tout porte à croire que ce vote sera favorable à une écrasante majorité et sans trop de débat puisque tous les partis politiques marocains sont favorables actuellement à ce genre de banques, et sont convaincus que cela aidera à une revitalisation significative de l’économie marocaine.
Le gouvernement a choisi le terme « finance participative » plutôt que « banques islamiques » afin d’éviter une référence directe à la religion. Ce choix a été fait après que des théologiens et des experts financiers aient été associés à la conceptualisation de cette nouvelle formule financière.
Le Maroc est parmi les derniers pays s qui adoptent le concept de banques islamiques, principalement pour des raisons politiques et ensuite économiques. L’approbation par le gouvernement du principe d’ouvrir le champ aux banques islamiques n’est en réalité que l’application concrète d’une décision prise auparavant par l’Etat marocain avec la bénédiction du Palais royal.
La principale raison qui a empêché l’arrivée de banques islamiques au Maroc, en dépit de l’émergence de ces type d’institutions dans le monde musulman depuis l’année 1973, suite à la recommandation des ministres des Finances des pays islamiques réunis à Djeddah, est la contradiction entre cette approche avec le fait que l’Union Européenne est le principal partenaire économique du Maroc.
Cette thèse s’est renforcée avec l’arrivée au pouvoir du roi Mohammed VI et l’émergence au sein de son entourage d’une tendance séculaire au penchant très laïcisant, qui est allergique à tout ce qui porte le qualificatif d’islamique ou repose sur une conception islamique au sens politique, parce que, selon cette tendance, tout ce qui est islamique est automatiquement fondamentaliste, sous développé et contraire à la modernité.
Le Maroc a été surpris par l’attitude de certains pays Européens connus pour leur attachement à l’économie libérale, en particulier la Grande-Bretagne, consistant à adopter et encourager les banques islamiques et les produits financiers islamiques. Après des années d’hésitation, le Maroc a fini par faire le pas de parier lui aussi sur les banques islamiques.
Dans le même temps, il est un facteur économique fondamental concernant la décision de nombreux marocains de ne jamais s’approcher des banques dans leur forme actuelle, par principe, et qui seront motivés par l’ouverture de comptes dans les banques islamiques ou l’acquisition de produits bancaires de nature islamique. Par ailleurs, il y a une tanche d’investisseurs des pays du Golfe qui ont une préférence pour les banques islamiques et qui par conséquent pourraient investir leur argent au Maroc pour la première fois.
Le pari sur les banques islamiques, qui seront appelées «banques participatives», et sur les produits financiers participatifs offerts par les banques actuelles, est de nature à donner un coup de pouce au cycle économique et aux investissements, ce qui pourrait apporter au final entre un point et un point et demi de croissance économique supplémentaire, ce qui permettra au taux de croissance annuel de ne pas tomber en dessous du seuil des 4 %.