Le roi du Maroc Mohammed VI, dans son discours du 20 août à l’occasion de l’anniversaire de la révolution du Roi et du peuple, a évoqué le rapprochement souhaité avec la Chine et la Russie. C’est la deuxième fois que le roi cite ces deux pays, après le discours du trône. Cette évolution marque un début de virage diplomatique, qui ne se réalisera pas sans que le Maroc ne fasse des concessions à Pékin et Moscou, dans les domaines commercial et militaire.
Cette nouvelle orientation du Maroc est dictée par des changements qui se produisent à l’échelle internationale, avec l’émergence de nouvelles puissances, et en même temps à la suite du déclin de l’importance du Maroc pour l’Occident. Ce déclin est attesté par la baisse de la qualité des relations avec l’Union européenne et par les positions de certains pays occidentaux dans le conflit du Sahara, comme la Grande-Bretagne et les Etats-Unis, ce qui constitue une vraie source d’inquiétude pour Rabat.
Le Maroc essaie de profiter de la montée de la Chine et du retour de la Russie sur la scène internationale, mais ce processus l n’est pas aisé en raison de l’appartenance du Maroc depuis des décennies au camp politique occidental.
Le partenariat stratégique souhaité par le Maroc avec la Chine et la Russie signifie un début d’inflexion relative de la diplomatie marocaine, qui a toujours été liée à l’Occident depuis l’indépendance. Mais cette inflexion ne se réalisera pas automatiquement, le Maroc devra fournir des services politiques et militaires et recevra d’autres services en échange.
Le partenariat stratégique vise à renforcer les relations avec deux pays ayant un poids politique et militaire dans le monde, dont le droit de veto et le volume des ventes d’armes à travers le monde, en particulier dans le cas de la Russie.
Alifpost a essayé de voir comment des pays en développement, en particulier en Amérique latine qui gravitaient dans l’orbite de l’Occident, ont changé de posture en se rapprochant de la Chine et la Russie. En fait, il s’agit soit d’un changement radical de politique, dû à l’arrivée au pouvoir de forces politiques hostiles aux États-Unis, soit de pays qui, sans abandonner leurs liens avec l’Occident, ont compris que leur intérêt consista à parier sur les nouveaux acteurs mondiaux comme la Russie et la Chine. Ainsi, la Turquie entretient d’excellentes relations avec la Chine. A son tour, l’Egypte et même l’Arabie Saoudite renforcent leur relation stratégique avec Moscou, via les échanges de services.
À cet égard, parmi les services que le Maroc pourrait fournir dans l’avenir à la Chine, le renforcement des échanges commerciaux et la fourniture de facilitées aux hommes d’affaires chinois qui envisageraient des investissements au Maroc visant principalement à l’exportation vers le marché européen. La Chine a essayé par le passé de construire une ville chinoise au Maroc, mais les autorités marocaines avaient refusé. Dans le même temps, il est difficile de construire un partenariat stratégique avec la Chine sans adopter, de temps en temps, ses positions dans les questions internationales.
Le Maroc parie plus sur la Russie que sur la Chine. Ce pari a besoin d’échanges de bons procédés de nature plus politique que commerciale. Le Kremlin cherche à renforcer son influence dans le monde et gagner de nouveaux amis et interlocuteurs, et le Maroc a vocation à en faire partie. La Russie pourrait lui demander d’accorder des facilités militaires dans les ports marocains pour ses navires de guerre qui croisent en mer Méditerranée et même dans l’océan Atlantique. En outre, elle pourrait solliciter l’appui de ses positions dans les questions internationales telles que le Moyen-Orient.
Théoriquement, le Maroc n’aura pas de difficulté à fournir ces services en échange d’autres, puisque l’Ouest a progressivement commencé à l’abandonner, et la logique nécessite la recherche de nouveaux alliés dans le cadre des intérêts diplomatiques et militaires réciproques.