Dans son discours à l’occasion de la fête nationale “La révolution du Roi et du Peuple”, le roi Mohammed VI a demandé aux partenaires traditionnels et nouveaux du Maroc une position claire concernant la souveraineté du Maroc sur le Sahara. Il s’agit d’une référence explicite à la France, dont la position sur cette question est devenue ambiguë au cours des deux dernières années. Et aussi Israël, qui est un nouveau partenaire qui refuse de reconnaître la propriété marocaine du Sahara malgré la normalisation des relations.
Le Roi a prononcé le discours dans la soirée du samedi 20 août. Le discours s’est concentré sur la question du Sahara. Il a souligné que la position des pays sur cette question est devenue un thermomètre pour le Maroc afin de mesurer la qualité de ses relations avec eux. Soulignant dans son discours que “La question du Sahara est le miroir dans lequel le Maroc regarde le monde, et c’est le critère clair et simple par lequel il mesure la sincérité des amitiés, et l’efficacité des partenariats”.
Le Roi a évoqué la position des pays qui soutiennent la position du Maroc dans le conflit. Après avoir remercié les pays arabes et africains, il a fait un hommage aux pays occidentaux, notamment aux Etats-Unis et à l’Espagne. À leur égard, il a indiqué : “La position constante des États-Unis d’Amérique a été une véritable incitation, qui ne change pas avec le changement des administrations, et n’est pas affectée par les circonstances. Nous sommes également reconnaissants de la position claire et responsable de notre voisin l’Espagne. Elle connaît bien l’origine et la vérité de ce conflit. Avec sa position positive, une nouvelle phase du partenariat maroco-espagnol a été établie, non affecté par les conditions régionales et les développements politiques internes”.
Quant aux nouveaux partenaires, il s’agit directement d’Israël, puisque le processus de normalisation avec Israël s’est fait en échange de la reconnaissance de l’appartenance du Sahara au Maroc. Mais jusqu’à présent, Israël n’a pas pris de position claire. Son représentant diplomatique au Maroc, David Gouvrin, avait déclaré dans une interview à l’agence de presse espagnole EFE qu’Israël soutient les efforts de l’ONU, sans faire référence à l’autonomie.
Il est remarquable qu’il n’ait pas salué ou fait référence à la France. Cependant, il a envoyé un message presque non codé à Paris en confirmant dans le discours que “nous attendons de certains pays, partenaires traditionnels et nouveaux du Maroc, dont les positions sur la marocanité du Sahara ne sont pas claires, qu’ils clarifient leurs positions.”
La France a toujours soutenu le Maroc sur la question du Sahara, mais sa position a changé de manière ambiguë au cours des deux dernières années. D’une part, elle n’a pas bien accueilli la position de l’ancien président américain Donald Trump lorsqu’il a reconnu la souveraineté du Maroc sur le Sahara au cours du mois de décembre 2020, et d’autre part, elle aurait empêché l’UE d’adopter une position qui complète l’initiative de Trump.
Le discours du roi intervient une semaine avant la visite du président français Emmanuel Macron en Algérie, sa première visite officielle en Afrique du Nord après son second mandat présidentiel. L’attente est grande au Maroc, ainsi que dans les pays voisins, pour savoir si Macron acceptera, dans le communiqué final de la visite, de “soutenir les efforts des Nations unies dans le conflit du Sahara”, ou s’il évitera de faire référence à cette question. Il serait intéressant de noter que l’Algérie a laissé entendre à la France que l’amélioration des relations bilatérales passe par un changement de sa position (Paris) sur le conflit du Sahara, c’est-à-dire qu’elle doit cesser de soutenir la proposition d’autonomie du Maroc.
Éviter une référence au conflit du Sahara dans le communiqué de la visite signifie que Paris continue de soutenir la proposition d’autonomie présentée par le Maroc. Et toute référence aux efforts de l’ONU sans parler d’autonomie entraînera un changement significatif de la position de la France sur cette question, et aggravera donc sans aucun doute la crise actuelle entre Paris et Rabat.
Les relations entre le Maroc et la France traversent par ailleurs leur pire crise silencieuse, puisqu’aucun ministre français ne s’est rendu au Maroc depuis plus d’un an et vice-versa, ce qui constitue un précédent dans l’histoire des relations entre les deux pays au cours des dernières décennies.