Affaire Anouzla : Le parquet Espagnol refuse la plainte du Maroc contre El Pais et met à nu la Justice marocaine

L’audience nationale, la plus haute Cour en Espagne, vient de refuser la plainte déposée par le Chef du Gouvernement Marocain Abdelilah Benkirane contre le journal El Pais et le journaliste Ignacio Cembrero

L’audience nationale, la plus haute Cour en Espagne, vient de refuser la plainte déposée par le Chef du Gouvernement Marocain Abdelilah Benkirane contre le journal El Pais et  le journaliste Ignacio Cembrero pour avoir publié une vidéo attribuée à Al-Qaida au Maghreb Islamique, qui menace Maroc. Cette décision judiciaire constitue un embarras majeur pour la justice marocaine, qui poursuit le journaliste Ali Anouzla parce qu’il a publié sur le site Lakome un lien vers l’article d’El Pais.

L’audience nationale a estimé qu’El Pais et Cembrero n’ont fait que leur travail dans le cadre de la liberté d’information, ne commettant ainsi aucune infraction.   Selon El Pais, la Cour a estimé qu’il n’y a pas de preuve pour justifier une enquête avec le journaliste et le journal. En conséquence, le dossier est classé, et la Cour va dans les prochains jours notifier à l’avocat des autorités marocaines les justifications juridiques de son rejet de la plainte.

Alifpost avait publié un article il y a quelques jours qui préfigurait la décision de l’audience nationale. De même, quand le ministre de la Justice Mustafa Ramid avait annoncé la décision du Maroc d’attaquer en justice El Pais, Alifpost avait publié une analyse qui penchait pour le rejet de la plainte, pour deux raisons. La première est que dans les cas de vraie menace terroriste ou d’apologie de terrorisme, le parquet espagnol se mobiliste très vite. En effet, les lois espagnoles anti-terrorisme sont parmi les plus avancées dans le monde parce que ce pays a souffert du terrorisme de l’ETA depuis les années soixante et ainsi développé tout un arsenal juridique approprié. Dans le cas d’El Pais, il n’y avait aucune preuve d’apologie du terrorisme.

La deuxième raison est que la publication par les médias d’une vidéo au contenu terroriste est une pratique courante qui relève du travail d’information. D’ailleurs, c’est ce qu’a dit le journal américain Washington Post lorsqu’il consacré le 2 Octobre dernier un éditorial à l’arrestation d’Ali Anouzla. Le 19 mai dernier, le journal prestigieux est revenu à la charge en exigeant que le Roi Mohammed VI arrête la poursuite contre Anouzla.

Non seulement les autorités du Maroc ont refusé d’écouter les experts de droit espagnol qui leur avaient déconseillé de s’engager dans une bataille juridique perdue d’avance, et se trouver dans une posture très inconfortable à l’échelle nationale et internationale, mais elles se sont adressées à un avocat dont la réputation est pour le moins louche.  Me José Luiz Sanz Arribas a défendu des personnes impliquées dans le coup d’Etat militaire de 1981 en Espagne et certains membres de la mafia et des trafiquants d’armes.

D’ailleurs, selon les sources d’Alifpost, le Maroc a versé à cet avocat une première avance de 115.000 Euros lors de l’ouverture du dossier, soit environ 1.300.000 dirhams, sur un total d’honoraires de 3.000.000 dirhams. Cependant, cette information n’est pas encore confirmée.

A la lumière de ces développements, Comment réagira le système judiciaire marocain dans le dossier d’Ali Anouzla ?  En effet, la justice espagnole qui a une image solide en matière de lutte antiterroriste et dispose d’un arsenal juridique sophistiqué, a rejeté la plainte du Maroc contre El Pais qui a publié la vidéo d’AQMI. Au Maroc, où le site Lakome arabophone n’a fait que publier le lien vers le site d’El Pais, la justice poursuite Ali Anouzla pour apologie du terrorisme. A l’opposé de la justice espagnole connue mondialement pour son indépendance, l’image de la justice marocaine dans le monde est celle d’une justice des « instructions ». Elle se trouve, encore une fois, devant une véritable épreuve.

 

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