Editorial: la légitimité du boycott

Une partie importante du peuple marocain a entamé depuis  deux semaines un mouvement de boycott de  certains produits de quelques sociétés bien connues : le lait de la Centrale laitière, l’eau minérale de Sidi Ali et les carburants des stations Afriquia. Ce boycott se poursuit sur un fond de grogne sociale et de  grandes manifestations populaires dans un certain nombre de villes et régions, en particulier le Rif.

Ce boycott soulève des questions sur l’identité de  ou des entités qui appellent  à l’observer. S’agit –il de règlements de compte politique qui visent des individus précis dont en particulier  aziz Akhannouch,le nouveau président du parti RNI ( Rasemblement National des indépendants). Mais ces questions, aussi légitimes soient- elles, demeurent secondaires et  marginales devant la légitimité du boycott lui-même. Et qui puisent sa légitimité de quatre éléments, dont en particulier :

Avant tout, la hausse inquiétante des prix de plusieurs produits au Maroc et qui  a atteint des niveaux dangereux, avec quelques articles dont le prix dépasse celui des articles similaires   en Europe, surtout si on tient compte du différentiel de revenu qui peut atteindre dix fois sachant que le Maroc est l’un des rares pays du monde où la  facture d’eau et d’électricité dépasse les pensions  de certains retraités.

En deuxième lieu, l’incapacité de la majorité du peuple marocain à supporter le coût de la vie et sa crainte des menaces  qui ont atteint des niveaux de scélératesse, ce qui fait que la  simple revendication sociale se mesure avec le thermomètre du patriotisme ou pousse les autorités à l’insulte  comme ce qui s’est passé dans les années 1980 lorsque le roi Hassan II avait traité les manifestants d’ appaches.

Troisièmement, l’absence de la volonté de  l’état d’activer  le  Conseil de la Concurrence  chargé d’assurer le contrôle de la manipulation des prix par les sociétés. Cette absence  fait que l’Etat devient complice du crime puisqu’il laisse les citoyens désarmés face à des sociétés qui ne cherchent que le profit  immédiat.

En quatrième lieu, le boycott reflète le refus des citoyens de la manipulation par les autorités de la scène  politique, devenue une arène où se disputent les barons nouveaux de la politique et qui cumulent les mandats et les avantages financiers et dictent leurs volontés à l’Etat.

Cinquièmement, ce boycott est le résultat  immédiat de l’échec du  modèle de développement avoué par le premier responsable, le roi Mohamed VI lui-même, lequel échec se poursuite alors que les différences de revenus continuent de se creuser et que certains acteurs économiques et certains individus  monopolisent le marché.

Ce boycott pose encore une fois la, sempiternelle question M ou se trouve la fortune  du Maroc et des Marocains ?

Ce large boycott populaire qui vise trois sociétés, et qui  reflète le niveau de prise de conscience chez les marocains au sujet de leurs droits violés, est un signal d’alarme adressé à l’Etat pour qu’il bouge avant que la situation sociale ne se détériore encore plus.

La recherche d’une solution au boycott ne devrait pas passer une autre fois à travers la répétition des erreurs politiques appliquées par L´Etat dans Rif en donnant la priorité á  la violence et les arrestations arbitraires.

Le Maroc a besoin de mesures courageuses.

Sign In

Reset Your Password