Un groupe d’activistes de la région du Rif, dont le leader Nasser Zafzafi, actuellement en prison, ont renoncé à la nationalité marocaine. Cette mesure qui ne va pas au-delà de la protestation contre l’injustice a provoqué une controverse politique et nous amène à soulever une question de fond: l’Etat marocain donne-t-il de la valeur à la nationalité marocaine?
Le Groupe Zefzafi avait annoncé la rupture du lien d’allégeance au roi Mohammed VI et l’abandon de la nationalité marocaine, et avait exposé dans une lettre datée du 23 août 2019 les raisons de cette initiative, qui sont liées à l’injustice infligée à ces jeunes dont la seule chose qu’on leur reproche était d’avoir osé exiger de meilleures conditions de vie (sur les plans éducation et santé) et des emplois décents, mais ils se sont retrouvés devant des accusations très graves, y compris la volonté de séparatisme et ont été condamnés à des peines sévères allant jusqu’à 20 ans de prison ferme.
Cette décision a provoqué un grand débat politique entre les conservateurs, les opposants, les partisans et une catégorie qui n’attend que de telles situations pour montrer son supposé patriotisme, oubliant que le vrai patriotisme exige d’abord le courage de dénoncer la corruption en citant les noms des corrompus et non pas par des formules alambiquées et vagues.
La vraie question qui se pose est la suivante: Est- ce que l’Etat Marocain accorde de la valeur à la nationalité marocaine? En effet, les pays qui accordent de la valeur à leur nationalité sont ceux qui respectent les principes suivants :
En premier lieu, l’égalité entre les citoyens, où l’État assure l’égalité judiciaire et sociale à tous ses citoyens, mais ce principe est absent de manière alarmante dans le cas du Maroc, nous en voulons pour preuve que les voleurs ayant des comptes bancaires au Panama et ceux responsables des fuites des capitaux continuent à dormir tranquilles et vivre dans le confort, et que les auteurs des crimes financiers terribles cités dans les rapports de la Cour des Comptes savent bien qu’ils vont échapper à la rigueur de la justice alors que celui qui revendique des services de santé et d’éducation se retrouve en prison suite à des accusations fabriquées de toutes pièces.
Deuxièmement, l’Etat garantit au citoyen marocain de le défendre à l’étranger s’il est soumis à une atteinte à ses droits, et ici l’Etat marocain adopte une conduite irresponsable: Les Marocains ont vu comment l’Etat et au plus haut niveau s’est mobilisé pour la défense d’un artiste( Saad Lemjarred) soupçonné d’ implication dans des délits sexuels, tout en abandonnant des citoyens qui ont été victimes d’abus tels que la déportation. Il suffit d’évoquer le problème des mineurs marocains dont certains, en Europe, sont soumis au crime organisé, au viol, à la drogue et au déplacement sans que l’État Marocain fasse de leur situation une priorité comme si ces mineurs n’avaient pas la nationalité marocaine mais celle d’un pays tiers.
Une autre partie du débat concerne la façon dont un certain nombre d’hommes d’affaires et de politiciens poursuivent le rêve d’obtenir une citoyenneté européenne, et plus récemment, la citoyenneté canadienne, même s’ils ne sont pas des immigrants. L’Etat devrait se demander pourquoi les jeunes Marocains renoncent à leur nationalité marocaine pour demander l’asile politique ou humanitaire dans les pays européens, où ils prétendent être des Palestiniens ou des Syriens d’autres nationalités.
L’Etat a la responsabilité de protéger la nationalité, et cette responsabilité suppose la justice et l’égalité dans les différents secteurs: judiciaire, politique, économique, social et culturel. C’est seulement ainsi que l’Etat peut se hisser au niveau de sa responsabilité historique.
L’administration qui gère ce pays appelé le Maroc n’est pas encore au niveau de la défense de la nationalité marocaine parce que la justice est absente dans cet espace géopolitique de la terre.