Le ministre des Affaires étrangères Salaheddine Mezouar a annoncé que la prochaine visite du roi Mohammed VI à Moscou aura lieu en Octobre prochain. C’est peut-être l’une des visites les plus importantes du roi à l’extérieur, plus que la récente visite à la Maison Blanche, en raison de l’abandon progressif du Maroc par l’occident, qui recherche uniquement ses intérêts, et en raison de la nécessité pour le Maroc de diversifier ses partenaires à la lumière des difficultés que vit la dossier du Sahara sur le plan international.
Le ministre des Affaires étrangères Salaheddine Mezouar s’est rendu à Moscou cette semaine, et a remis au ministre des Affaires étrangères russe Sergueï Lavrov un message du roi Mohammed VI au président russe Vladimir Poutine, avec qui il a discuté des questions bilatérales et internationales. En plus de ses louanges à l’égard du président Vladimir Poutine, Mezouar a annoncé la visite du roi en Russie en Octobre.prochain.
La visité pourrait préfigurer un probable changement fondamental dans la diplomatie marocaine, solidaire depuis longtemps du camp occidental contre le bloc de l’Est, même après l’effondrement de l’Union soviétique. Tout récemment, dans le dossier syrien, Marrakech a abrité il y a deux ans un sommet international des amis du peuple syrien, avec le soutien de Paris et Washington.
On ne peut comprendre la prochaine visite du roi si on ne la lie pas au dossier du Sahara, qui est le dossier le plus important du Maroc aussi bien sur le plan interne qu’externe. Ce dossier fait face à de réelles difficultés au niveau international, à un moment où le Maroc est lâché petit à petit par ses partenaires occidentaux, comme la Grande-Bretagne et les États-Unis et un peu la France après la crise entre les deux pays, et après la décision de l’ONU de faire de l’année prochaine celle d’un vrai tournant dans la recherche d’une solution au conflit.
L’an dernier, lorsque le Maroc s’est trouvé face à la volonté de Washington d’imposer une résolution au Conseil de sécurité élargissant le mandat des forces de la MINURSO pour surveiller les droits de l’homme au Sahara, c’est que Moscou qui a sauvé la situation en exprimant son refus de cautionner une décision qui pourrait menacer la stabilité.
Le pari du Maroc sur la Russie relève de la diversification de ses partenaires diplomatiques, dans un monde en perpétuel changement et où les intérêts du moment dictent d’avoir des nouveaux partenaires. On peut même dire que le Maroc a tardé à se tourner vers ces nouveaux partenaires et s’est trop longtemps contenté de son alliance avec l’Occident, qui a fini par décevoir ses espoirs.
Ce pari coïncide avec un retour en force de la Russie sur la scène internationale et son effort de construire une diplomatie qui évite les décisions internationales qui déclenchent de chaos dans certaines régions du monde. Contrairement à l’époque où l’Union soviétique jouait le rôle de chef du camp communiste, la Russie actuelle prend ses décisions sans être otage d’une quelconque idéologie.
Le Maroc bénéficie de ce retour de la Russie, principalement dans le conflit du Sahara marocain. Même si Moscou est considéré comme un allié traditionnel de l’Algérie, elle a défendu la position du Maroc au Conseil de sécurité des Nations unies lorsque Washington, que le Maroc considère pourtant comme son partenaire historique, a voulu en avril 2013 étendre le mandat des forces de la MINURSO au contrôle du respect des droits de l’Homme.
Alifpost avait, dans un article du début de Janvier 2014, prédit que le Maroc allait tirer avantage du retour en force de la Russie sur la scène internationale. Cet article avait été traduit en russe et publié par les médias russes de premier plan.
Pour toutes ces raisons, la visite du Roi à Moscou pourrait constituer un tournant majeur pour la diplomatie de Rabat et influer fortement le dossier du Sahara. La question qui se pose, comme la politique est une affaire d’intérêts, est celle de la nature et la qualité de la contrepartie que le Maroc va consentir pour bénéficier durablement de l’appui russe. Cette visite coïncide aussi avec l’intérêt croissant de la Russie pour la Méditerranée, où ses navires de guerre accostent en permanence dans le détroit de Gibraltar.