Pourquoi la situation politique en Algérie surprend tout le monde

manifestation en Alger

Dans son rapport au Congrès américain en janvier dernier sur les dangers dans le monde, Daniel Ray Coates, directeur du Renseignement national, n’a pas évoqué la possibilité d´une crise politique en Algérie. Aujourd’hui, l’Algérie est devenue un problème pour l’Occident et la Russie, qui craignent l’effondrement du pouvoir dû à l’insistance du président Abdel Aziz Bouteflika à se présenter aux élections présidentielles malgré sa maladie et son incapacité.

Les Algériens sont sortis dans les villes du pays en manifestations historiques surtout le 8 mars, pour dire NON avec des lettres majuscules à la candidature de Bouteflika. Ils ne veulent pas être gouvernés par un président qui n’a pas fait de discours depuis des années. Même lors des dernières élections présidentielles, il n’a participé à aucune manifestation électorale. Et malgré cela, il a gagné. La presse arabe et occidentale compare la situation actuelle de Bouteflika à celle de l’ancien président égyptien Hosni Moubarak avant d être renversé en 2011. Jusqu’à ces dernières semaines, l’avenir de l’Algérie ne suscitait aucune inquiétude dans les capitales européennes, même á Washington et Moscou. Paris, Madrid, Rome entre autres ont considéré que Bouteflika va gagner les élections. Les Think Tanks n’ont pas non plus mis en garde contre une éventuelle tension politique en Algérie. En outre, tout à coup, il y a une surprise politique, une crise qui pourrait être le prélude à un nouveau printemps arabe. L’absence de prévision occidentale de ce qui se passe actuellement en Algérie est due à plusieurs facteurs :

Lorsque le printemps arabe a éclaté en 2001, le Président Bouteflika était dans un état de santé acceptable, assistant aux réunions, recevant les chefs d’Etat et visitant différentes régions du pays. -Le régime algérien a investi massivement dans le domaine social, en finançant des projets de jeunesse, en accordant davantage de bourses d’études aux étudiants et d’aide sociale aux pauvres, y compris la classe moyenne. -Autre facteur important, le peuple algérien en 2011 a encore subi les conséquences du terrorisme dans les années 1990. C’est pourquoi le printemps arabe n’a pas eu d’impact, contrairement à ce qui s’est passé dans les pays voisins comme la Tunisie et relativement le Maroc.

Un autre fait géostratégique a à peine attiré l’attention des analystes. En 2011, la Russie croyait que l’Algérie pouvait être intervenue par l’Occident, comme ce fut le cas en Libye. Surtout quand le Pentagone a envoyé des Marines à la base Moron dans le sud de l’Espagne en 2012. C’est pourquoi elle a fourni à Alger le système S400 et les terribles missiles Iskander pour dissuader les Occidentaux. Nous ne devons pas oublier que Moscou croit que le printemps arabe est une manœuvre de l’Occident et non une révolution des peuples arabes pour la démocratie. La majorité de la classe politique algérienne considérait également le printemps arabe comme une conspiration.

Aujourd’hui, la situation est différente. Huit ans se sont écoulés depuis le printemps arabe. Le peuple algérien ne voit pas son président. Même Bouteflika a été élu en 2014 sans participer à aucune rassemblement électoral, un fait sans précédent dans les dernières décennies dans le monde. Pendant des années, il n’a pas adressé de discours à la population.
Aujourd’hui encore, les données montrent que le régime algérien (le président et ses conseillers) ne contrôle pas la situation. Les grandes capitales n’ont pas détecté l’indignation de l’opinion publique algérienne. Le peuple n’accepte plus que quelques-uns dirigés par Said Bouteflika, frère du président, sans légitimité politique, continuent à gérer les affaires de l’Etat.
Les manifestations du 8 mars marquent un tournant dans l’histoire récente de l’Algérie. Les Algériens crient BASTA. Ils ont signé la fin du régime. Le titre du journal algérien TSA est très révélateur : “La rue a tranché, la fin du régime Bouteflika, la transition commence”. Le titre de ce journal résume la conclusion à laquelle sont parvenus Paris, Madrid, Washington, Moscou et d’autres capitales, ainsi que l’armée algérienne. Pour cette raison, le chef de l’armée, Caid Salah, ne critique plus les manifestations, mais au contraire loue les actions du peuple.

Maintenant, tout le monde veut résoudre le problème algérien, mais ils ne savent pas comment. L’Algérie est une importante source de gaz pour l’Europe du Sud. Une barrière contre le terrorisme et l’immigration. Si l’État échoue, les conséquences seront désastreuses. C’est pourquoi l’Occident ne fait pas pression sur l’Algérie, il la traite différemment du Venezuela.

La situation est très préoccupante en Algérie. S’il faut du temps pour le résoudre, ce pourrait être le prélude à un nouveau printemps arabe. Et si Bouteflika se présente aux élections, les Algériens pourraient déclarer leur désobéissance.


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