Interview Mohamed Rida avec Akhbar al Youm le 08 MAI 2019
Les propos de délégué ministériel des droits de l’Homme ont soulevé une grande polémique dans les milieux judiciaires et des droits de l’Homme, puisqu’elles auraient défendu une vision et une attitude très autoritariste du Pouvoir à l’égard des questions traitées lors de son interview.
Dans cette interview, l’ingénieur Mohamed Rida, qui est membre du Bureau Exécutif du Forum de la Dignité pour les droits de l’Homme, réagit en détail aux propos du délégué ministériel.
-Comment vous réagissez, en tant qu’acteur civil de défense des droits de l’Homme, aux déclarations de Mr Chaouki Benyoub, dans sa première sortie médiatique , pensez-vous qu’il avait plus un discours politique qu’un discours des droits de l’Homme ?
Mr Chawki Benyoub a un passé très respectable dans le domaine des droits de l’Homme et il est respecté et estimé par de nombreux acteurs dans le domaine des droits de l’homme. Nous attendons de lui d’apporter une vraie valeur ajoutée dans la nouvelle position qu’il occupe, mais permettez-moi de dire d’emblée que les positions exprimées dans son dernier interview ne sont pas réussies car elles se basent sur de fausses hypothèses, contraire à la Constitution et la loi.
Dire à un délégué ministériel et ancien acteur des droits de l’Homme connu qu’il ne connait pas bien la Constitution et qu’il la viole est un peu osé ? voire une accusation grave ?
Je dis que celui qui a prétendu quelque chose doit en apporter la preuve et c’est la Constitution et la loi qui seront nos arbitres et les affirmations que je vais exposer ne sont pas compliquées, mais très simples et peuvent être établies et vérifiées facilement et nous ne pourrons qu’être d’accord là-dessus.
Comment et en quoi il a violé la Constitution et la loi ?
Permettez-moi de commencer par les aspects de forme dans l’interview de Mr Benyoub,. Ce délégué ministériel a choisi de s’adresser au public via une institution médiatique privée qui a ses propres positions à propos des thèmes abordées par l’interview, et qui ne s’inscrit pas dans la cadre du droit à la liberté d’expression garantis à cette institution et à d’autres, mais des positions qui ont été condamnées légalement ou mentionnées très négativement par des rapports d’organes internationaux . En conséquence, le fait que le délégué ministériel exprime des opinions identiques à celles défendues par le même groupe médiatique à propos des mêmes thèmes pose un problème moral et éthique , sur le plan de la forme d’abord.
Comment ?
Prenons par exemple le cas de Taoufik Bouachrine, vous savez que le groupe de travail de l’ONU chargé de l’arrestation arbitraire a publié un rapport sur ce dossier. Le délégué ministériel a exprimé une opinion à son sujet que nous verrons plus loin , et vous savez que l’actionnaire principal du groupe médiatique en question, Mr Ahmed Charii, a un différend juridique devant les tribunaux avec le journaliste Bouachrine, à tel point que le rapport du groupe de l’ONU a cité négativement un certain groupe de presse, qui a été utilisé pour faire pression sur des femmes citées dans le dossier, et qui ont refusé de cautionner les accusations contre Bouachrine,
Voulez-vous dire que le choix du délégué ministériel de faire cette sortie médiatique à travers ce support en particulier entame sa neutralité et son objectivité ?
C’est la moindre des conclusions qu’on peut tirer. Cependant je ne veux pas dire qu’il faut ôter à ce groupe de médias son droit d’interviewer n’importe quel responsable officiel. Mon propos s’adresse au délégué lui-même pour lui dire que sur le plan éthique et moral, vous ne pouvez pas passer par un adversaire politique et judiciaire pour exprimer les mêmes positions défendues par cet adversaire . voilà ce qui inacceptable de la part de tout responsable qui occupe une grande fonction dans l’appareil de l’état, à moins de devenir partie au conflit et engager les institutions de l’état comme antagoniste, alors que l’état est réputé demeurer loin de cette affaire judiciaire.
Est-ce que les positions de M. Benyoub sont identiques aux positions de ce groupe de médias qui l’a interviewé ?
Bien sûr, il a été conforme avec ce que défend ce groupe sur plusieurs questions, et principalement le cas du journaliste Bouachrine.
Vous voulez dire que nous sommes juste en face d’un point de vue unique qui se répète à plusieurs endroits ?
M. Benyoub s’est exprimé de manière agréable avec son joli accent de Marrakech et a prouvé qu’il maitrisait bien les dossiers de son domaine de compétence, mais je peux dire que l’image qu’il a laissé dans les esprits est que Monsieur le délégué ministériel est venu surtout pour défendre les positions de l’autorité dans tous les sujets abordés abordées. On attendait de lui un peu d’équilibre dans l’approche des dossiers évoqués durant l’interview, quel que soit leur degré de maitrise des questions soulevées et leurs détails, mais l’impression laissée par le délégué ministériel est sa volonté de défendre vivement la position de l’autorité uniquement .
Est-ce qu’un délégué ministériel est supposé être neutre ?
Je ne lui demande pas d’être neutre, car sinon son propos sera insipide et inodore, mais je dis que ses positions doivent être bien construites et reposer sur la Constitution , la loi et les normes éthiques et juridiques internationales et nationales, et à ce niveau je constate que M. Benyoub n’a pas respecté cette méthodologie.
Vous avez dit que le délégué ministériel a exprimé des positions contraires à la Constitution. Comment ?
M. Benyoub s’est basé , dans un certain nombre de questions, sur des principes à l’encontre de la Constitution. Par exemple, quand il s’est présenté lui-même comme un ministre membre du gouvernement, ce qu’il a dit n’est pas vrai et contraire à la Constitution, dont le chapitre 87 définit explicitement qui est membre du gouvernement et la loi organique sur l’action du gouvernement a bien défini qui sont les membres du gouvernement et le délégué. Mr Benyoub est allé très loin en disant que la délégation ministérielle se trouvait sous son ’autorité, ce qui n’est vrai que si le ministre de tutelle du secteur décide de lui donner délégation de pouvoir pour cela.
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Il s’ensuit que le Délégué ministériel n’est pas politiquement responsable devant les citoyens et leurs représentants ?
Il n’est pas un membre du gouvernement et par conséquent, il ne peut pas parler au public comme si c’était un responsable politique. Mr Benyoub est juste un fonctionnaire supérieur chargé tout simplement de mettre en œuvre les politiques publiques du gouvernement dans le domaine des droits de l’Homme, selon la Constitution., il fait partie d’une ossature administrative et peut à ce titre arracher les délégations qu’il veut. Je ne défends ici ni le ministre ni le gouvernement, ils sont aptes à de se défendre par eux- mêmes, mais il me semble qu’il veut se placer au-dessus de la Constitution et des institutions constitutionnelles qui concernent tous les citoyens marocains, et je ne sais pas d’où vient cette attitude hautaine, c’est d’ailleurs clair quand il dit que le Ministre d’Etat a le droit de prendre ce qu’il veut. Il appartient à chacun d’assumer ses responsabilités devant le peuple et devant les institutions qui contrôlent l’action gouvernementale .C’est la première fois qu’un responsable dans l’ administration ose parler au public comme s’il était un responsable politique officiel et membre du gouvernement, contrairement à la Constitution.
Mais la décision de nomination confirme que Mr Benyoub a été nommé délégué ministériel avec rang de ministre ?
Cette erreur est pratiquée dans une série de nominations et aussi dans des textes législatifs, pour la raison suivante : la formule est utilisée quand vous voulez accorder à un responsable de l’administration la rémunération et les avantages d’un ministre, en contrepartie de sa mission, et il y a plein de responsables de l’Etat qui ont été nommés avec grade de ministre au niveau du traitement. Ainsi, lorsque le Procureur du Roi à la Cour de Cassation a été nommé, la décision de nomination a bien spécifié qu’il allait bénéficier des indemnités et avantages accordés à un ministre mais personne ne pourra dire qu’il a le pouvoir du ministre. Il ne faut pas mélanger les choses, sinon nous allons agir en dehors de l’édifice Constitutionnel.
Nous remarquons que dans les positions exprimées par le délégué ministériel qu’il refuse de toucher à des sujets litigieux, et donc il exprime plutôt des positions politiques et non pas de droit, c’est ainsi qu’au sujet des détenus de la protestation du Rif, au lieu de répondre à la question de l’usage ou non de la torture, il a préféré critiquer l’usage du terme Hirak ? Quel est votre commentaire ?
Sur les plans juridique et judiciaire, il y a déjà une problématique qui est de la responsabilité du délégué ministériel et d’autres fonctionnaires, y compris l’existence de « sérieuses allégations » de torture, sachant que le Conseil National des Droits de l’Homme a chargé une ’équipe médico-légale de rédiger un rapport sur le sujet et dont le contenu est devenu du domaine public et qui citent l’existence de sérieuses allégations d’usage de la torture à l’encontre des détenus du des protestations du Rif et nous ne pouvons pas affirmer si ce sont des allégations vraies ou non mais elles sont sérieuses et elles nécessitent une investigation et la loi dit que l’investigation est obligatoire si le crime a une sanction qui atteint 30 ans , La loi oblige le procureur à demander au juge d’instruction d’ouvrir une investigation dès qu’il est informé, de quelque manière que ce soit, de ces allégations, mais il ne l’a pas fait et a même refusé d’aller dans cette direction.
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Même le délégué ministériel est muet sur ce point, c’est une question qui a suscité la controverse dans l’opinion publique. Pourquoi ?
Le délégué ministériel pour Monsieur a le droit de soulever les points qu’il veut et garder le silence sur ce qu’il veut, mais les positions qu’il a défendues manquent d’argumentation juridique solide et de conformité à la loi.
Nous pouvons avoir des avis divergents sur une interprétation particulière de la loi, mais quand le texte juridique est explicite nous ne pouvons pas diverger. Nous avons une institution nationale des Droits de l’Homme qui a réalisé une mission et en a conclu à l’existence d’allégations sérieuses de torture, le droit international et les obligations du Maroc obligent le procureur a ouvert une enquête judiciaire sous la supervision d’un juge d’instruction mais le procureur a refusé sous prétexte que le rapport médico- légal n’est pas un document judiciaire. Voici une façon d’induire en erreur l’opinion publique, car le parquet agit théoriquement au nom de la société pour défendre le droit et le respect du droit et l’ordre public et c’est à lui de confectionner le document juridique. D’ailleurs, le délégué ministériel a parlé du sous-comité chargé de la torture et il sait que les conventions internationales obligent les Etats à ouvrir une enquête sur toutes les allégations sérieuses de torture
Mr Le délégué a soulevé la question de la pression sur l’appareil judiciaire à travers la rue, et que cela ne change pas les convictions des juges ?
C’est un point de vue que nous entendons souvent et Mr le Délégué Ministériel a le droit d’avoir sa propre opinion, mais ce qui m’importe ici ce sont les affirmations contraires à la loi ou à la Constitution.
Bien sûr, je ne comprends pas où il veut en venir en disant que les manifestations des citoyens dans la rue visent à influencer les juges, alors que les moyens d’influencer les juges sont définis par le droit en tant qu’actions illicites comme les tentatives de corruption ou de chantage, et les manifestations reflètent le pouls des citoyens et il est du devoir de l’appareil judiciaire et des autres institutions constitutionnelles de les écouter attentivement car ce sont des institutions du peuple qui leur confère leur légitimité. Comment peut-on accepter les manifestations contre le pouvoir exécutif et législatif et refuser celles contre le pouvoir judiciaire, c’est contraire à toute logique démocratique. Est-ce que Mr Benyoub a oublié les
protestations des citoyens contre une décision du roi lui-même quand il a accordé la grâce au pédophile espagnol Daniel Galvan qui avait violé des enfants marocains, et qu’en réaction au protestations le roi avait annulé sa décision de grâce et reçu au palais royal les familles de ces enfants pour les consoler.
Je crois que Mr le délégué ministériel exprime a une conception très autoritariste du droit.
Voulez-vous dire que la protestation contre des décisions de justice est souhaitable ?
Quand nous disons que le droit de protester contre les décisions judiciaires n’ont pas lieu d’être, car cela menace la paix sociale ou influence les conviction des juges, c’est une erreur, car les citoyens ont le plein droit de protester contre le gouvernement, le parlement et aussi la justice s’ils estiment que ses jugements sont à côté de la réalité, pour une raison ou une autre. Il est vrai que le juge doit construire sa conviction sur la base du déroulement du procès devant lui au tribunal ( les faits, les preuves et les témoignages) mais le juge demeure une personne qui vit dans son environnement qu’il ne peut pas ignorer et doit , comme tout autre responsable public, interagir positivement avec le pouls des gens, leurs souffrances, leurs sentiments et leurs attentes.
Dans le cas de Bouachrine, le délégué ministériel a adressé une critique sevère au rapport du groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire, en lui reprochant de ne pas écouter les victimes, qu’en pensez – vous ?
Il est du droit du délégué ministériel d’avoir sa propre opinion mais l’arbitre c’est le droit et il se trouve que l’article premier du code de procédure pénale affirme que l’accusé demeure innocent jusqu’à preuve de sa culpabilité par une décision judiciaire ayant acquis la force de la chose jugée, et le journaliste Bouachrine a fait l’objet , jusqu’à ce jour, d’un jugement de première instance et donc il demeure réputé être innocent et les allégations des parties civiles ne sont que des allégations sans preuves judiciaires.
Ils vous diront que la loi marocaine prend en compte les dires des victimes de viols, quelle que soit la décision finale ?
C’est incorrect et c’est juste une tentative d’orienter le déroulement du procès et je répète que nous n’avons pas encore une décision de justice ayant acquis la force de la chose jugée, tout le reste est discutable..
Entendez-vous que la position du délégué ministériel est une tentative de soutenir l’orientation principale du jugement de première instance ?
Je ne pense pas, parce que je suis convaincu que la pression sur un juge ne se fait qu’au travers de moyens de coercition ou de tentation, si jamais le juge s’y soumets volontairement. Ce qui m’importe c’est que le délégué affirmé avoir construit sa conviction sur la base du jugement de première instance, ce qui est une erreur impardonnable.
Nous n’’avons pas besoin du 2éme paragraphe de l’article premier article du code de procédure pénale (qui insiste sur les garanties des conditions d’un procès équitable) mais il suffit de revenir aux communiqués des organisations comme « Reporters sans frontières » , « Amnesty International » , « Human Rights Watch » et « Committee for Protection of Journalists » pour s’apercevoir qu’ils ont tous dénoncé l’absence de ces conditions de procès équitable, en plus de nombreuses organisations nationales des droits de l’Homme et de personnalités nationales éminentes et d’une opinion publique nationale qui a acquis la conviction que le procès de Bouachrine n’a pas bénéficié de ces conditions, ce qui n’est contesté que par l’autre bord, en particulier le ministère public, qui affronte Bouachrine à propos de l’indemnisation des parties civiles et des quelques femmes que Mr le Délégué Ministériel qualifie de victimes, ce qui est une autre erreur
Pourquoi ?
Nous ne disons pas qu’il faut négliger les droits des femmes qui ont le statut de plaignantes dans le dossier de Bouachrine, elles sont partie civile,et le droit leur accorde le droit de réclamer une indemnisation et c’est ce qu’elles ont fait devant la Cour,. Cependant nous devons convenir que l’arrestation doit être décidée par le tribunal dans l’intérêt de la société et non pas celui des victimes auxquelles la loi accorde le droit aux indemnités. La vocation d’une partie civile n’est pas de réclamer l’emprisonnement d’un accusé sans base légale saine et bien avant qu’un jugement ne soit prononcé mai uniquement sur la base de suppositions sans preuves définitives..
C’est le fond du problème et qui nous fait dire que Bouachrine a subi une détention arbitraire et illégale.
Mais la Cour peut décider d’arrêter et emprisonner des suspects ?
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Bien sûr. Mais l’arrestation doit reposer sur une base légale explicite et l’article 608 du code de procédure pénale a spécifié les bases légales précises d’une arrestation. Soit il y a une décision de justice qui a acquis la force de la chose jugée, et qui a ordonné un emprisonnement ou une détention ou une contrainte par corps, soit il y a un mandat d’arrêt en bonne et due forme, tandis que dans le cas de Bouachrine il n’y a pas de décision de justice définitive, non pas sur la base d’un ordre du juge d’instruction mais tout simplement un ordre d’emprisonnement délivré par le procureur général près la Cour d’Appel de Casablanca qui n’est qualifié selon la loi , pour émettre des ordonnance judiciaires à la place des juges , et la durée de la détention arbitraire est limitée par la loi, elle ne peut pas dépasser la durée de 30 jours renouvelable deux fois pour les délits, ou 60 jours renouvelable cinq fois pour les crimes, ce qui ne correspond pas au cas de Bouachrine.
Pour ces raisons le groupe de travail de l’ONU chargé de la détention arbitraire a affirmé que Bouachrine est en situation de détention arbitraire de troisième catégorie.
Le délégué ministériel affirme que le plus important pour lui ce sont les faits et non pas leur qualification juridique ?
Les faits sont établis judiciairement par des preuves et non pas par l’utopie, et l’humanité a fini par établir des moyens et des mécanismes en vue d’établir les faits et tout écart peut conduire à des injustices envers les parties et l’article 23 de la Constitution a clairement indiqué qu’on ne peut arrêter ou déclaration de la culpabilité d’une personne que conformément aux procédure de la loi. Par conséquent, le pouvoir judiciaire et le délégué ministériel et les autres intervenants doivent veiller au strict respect des procédures. Mr Le Délégué Ministériel connait bien quelque chose qui s’appelle les objections de forme, qui, si elles ne sont pas respectées rigoureusement, le procès entier est frappé de nullité. Elles ont été établies en vue d’arriver à la vérité et leur violation signifie que le chemin est erroné et le procès frappé de nullité.
Ce qu’a dit le groupe de travail de l’ONU à ce propos ? il a affirmé que le violence contre les femmes est inacceptable, parce que les Nations Unies ont reconnu les droits des femmes, et je ne peux pas imaginer qu’un un responsable de notre administration aura l’audace de dicter à l’ONU comment protéger les femmes. Je rappelle que ce groupe de travail n’a pas discuté le fond de l’affaire, mais s’est penché sur les violations procédurales qui empêchent d’arriver à la vérité.il a ajouté que les autorités, pour protéger les droits des plaignantes, doivent assurer à l’accusé les garanties d’un procès équitable, ce qui est dans l’intérêt des plaignantes, et qu’elle autorise les observateurs internationaux à assister aux audiences du procès. Le groupe n’a pas discuté non plus l’action civile ni les détails des demandes d’indemnisation des plaignantes, ( Les parties sont d’un coté les plaignantes et de l’autre l’accusé ) mais s’est concentré sur l’action publique ( les parties sont les autorités publiques et le journaliste Bouachrine) et les recommandations de ce groupe de l’ONU engagent l’état marocain et ne concernent pas du tout les parties civiles.
La délégué ministériel a également abordé le dossier de Mr Hamieddine qu’on veut juger une deuxième fois pour les mêmes faits , en insistant sur le fait que la décision arbitrale de l’Instance Equité et Réconciliation n’avait aucune valeur légale dans ce dossier . pourquoi il s’est accroché de nouveau à un point secondaire dans ce dossier ?
J’ai perçu dans l’interview du délégué ministériel une sorte d’intimidation idéologique, remarquez comment il a choisi d’exclure des catégories de citoyens, tout en louant la référence idéologique d’une autre catégorie, ce qui constitue une tentative de les opposer les uns aux autres et susciter la solidarité de chaque camp vis-à-vis du camp rival.
Quelle est la relation avec le dossier de Hamieddine ?
Ce dossier pose la question des défenseurs des droits de l’Homme, car iles président du « Forum de la Dignité pour les Droits de l’Homme » et occupe des mandats politiques électifs, et il lui arrive d’exprimer des positions politiques qui ne sont pas du gout de certains autres acteurs politiques et ainsi et pour le punir on lui a ouvert un vieux dossier qui avait fait l’objet d’une décision judiciaire qui a acquis la force de la chose jugée.
Toutefois, et contrairement à la loi et à la position du parquet et du juge d’instruction, Monsieur le délégué ministériel a choisi de déclarer que le procès public n’est pas tombé, alors que l’article 4 du code de procédure pénale stipule expressément que le procès public tombe dans des situations spécifiques, y compris celle de l’existence d’une décision de justice qui a acquis la force de la chose jugée.
C’est un autre écart inadmissible de la part du délégué ministériel.
Mais on peut ouvrir le dossier à nouveau sur la base de l’apparition de nouvelles données ?
Oui mais dans la phase de l’enquête, où le juge d’instruction peut convoquer la personne pour investigation, et se rendre compte que les données disponibles ne permettent pas de décider une poursuite et clore le dossier. Dans ce cas le juge d’instruction n’a pas le droit de convoquer la personne une deuxième fois sauf si de nouvelles données apparaissent et tout cela ne peut s’appliquer à Hamieddine dans la mesure où il a fait l’objet d’un jugement ayant acquis la force de la chose jugée.
Globalement où allons-nous sur le plan des Droits de l’Homme ?
Il y a une sorte de rivalité entre deux perspectives : d’un côté celle des autorités que le délégué ministériel s’est employé à défendre, et de l’autre côté une demande de plus en plus croissante pour plus de droits et de libertés et cette dernière orientation ouvre devant l’acteur des droits de l’Homme de nouvelles perspectives d’action et nous risquons de voir une recrudescence des recours aux mécanismes de l’ONU. Le délégué ministériel pouvait critiquer le groupe de travail de l’ONU et sa critique pouvait être prise au sérieux si jamais le Maroc avait une tradition de réagir positivement aux recommandations des groupes de travail de l’ONU mais il ne le fait pas et refuse de façon systématique de telles recommandations, ce qui veut dire que les autorités marocaines n’acceptent pas ces mécanismes onusiens.
Il est positif que le pays dispose de mécanismes proactifs dans le domaine des droits de l’Homme, mais pour y arriver il faut d’abord ne pas violer les garanties constitutionnelles ni violer les droits des citoyens. Les violations systématiques des droits devraient conduire le pouvoir à revoir globalement et en profondeur leur approche des droits de l’Homme.